CHERIF : Faux-cool improbable
Classification : 0 étoile
Regardé par le rédacteur : Deux premiers épisodes de la saison 1
Rien ne pouvait présager une rencontre professionnelle, ni même personnelle, entre Adeline Briard et Kader Cherif. L’une est Major de promotion, sèche et bourgeoise comme une parisienne dans les mauvais romans de gare et « fille à papa » d’un grand chef dans la police. L’autre est médiocre aux examens, cool comme l’archétype du provincial et n’a obtenu de reconnaissance de ses pairs qu’à travers ses résultats. Pourtant, l’improbable association entre ces deux flics si différents a malheureusement eu lieu dans une série télévisée… elle-même improbable.
Pourquoi éviter Chérif ?
Gentleman cambrioleur ?
Pour son premier jour à la brigade criminelle de Lyon, Adeline Briard est vernie comme une chaussure du dimanche : alors qu’elle s’encourage dans sa voiture garée face au commissariat, elle aperçoit un homme en survêtement fracturant un appartement au rez-de-chaussée. Sa mutation chez les Gones commence par une arrestation en flagrant délit. Un premier trophée ? Hélas, non. Le cambrioleur n’est autre que son nouveau partenaire, le capitaine Kader Cherif, parti faire un jogging en ayant oublié ses clés dans son domicile. Au lieu d’une intégration par la grande porte, Adeline Briard doit d’emblée se trouver un trou de souris pour se cacher après une humiliation volontaire.

Méthodes de grands flics de séries policières
Formée à la théorie criminelle et raide comme la justice, cette fille du directeur général de la Police Nationale n’est pas au bout de ses crises d’hystérie face à ce capitaine volontiers charmeur et blagueur, zen et cool, excellent flic de terrain aux méthodes parfois étonnantes. En effet, Cherif préfère, par exemple, questionner les témoins d’une affaire – en particulier, les proches de victimes – dans le cadre plus détendu de son appartement, même si la déposition est juridiquement irrecevable, et soumet sa fille de 14 ans à des interrogatoires au commissariat pour savoir ce qu’elle fait de ses soirées. Pis, dans ses enquêtes, il s’appuie sur les méthodes de grands flics de séries policières pour débloquer des situations, en citant en référence la saison et l’épisode.

Briard et Cherif trop dissemblables
Il ne suffit pas, toutefois, de créer un héros ne s’énervant jamais (ou presque) comme l’inspecteur Columbo ou de jouer (l’air de rien, sans référence flagrante à ses origines) sur la diversité quarante ans après le lieutenant Kojak (tous deux cités par Cherif) pour séduire un public implacable avec la cohérence humaine des personnages et la qualité des scénarios. Dès l’entame, le trait est forcé pour montrer que Briard et Cherif sont dissemblables, et induire l’idée que ce fossé se comblera forcément, tant et si bien qu’ils finiront par coucher ensemble. Entre le concentré d’agressivité de Briard et le sourire permanent alliée à la démarche décontractée de Cherif, impossible de déterminer durant leurs scènes de ménage récurrentes lequel est le plus agaçant ou le moins crédible.

Le téléspectateur ne peut même pas reporter ses élans d’empathie sur les personnages secondaires, le brigadier grossier, l’intègre patron des « héros » ou l’avocate des démunis étant tous réduits à faire de la figuration comme de vulgaires hallebardiers en raison d’une absence totale de subtilité dans le traitement de leurs rôles.
Risque de surproduction de séries télés
Quand aux intrigues, si même l’expert de la Criminelle chargé de relever les empreintes sur une arme ne sait pas qu’il faut la démonter pour vérifier que l’assassin n’ait pas laissé de traces sur les pièces intérieures… Tout sonne faux. Seule l’incongruité des situations semble réglée comme du papier à musique. Malgré de bonnes intentions, Cherif marque une dérive déjà perceptible de l’engouement pour les séries télévisées : les chaînes de télévision françaises cherchant désormais à en produire à tout prix après avoir trop longtemps considéré ce genre avec peu de considération avant de chercher à reprendre la vague (contrairement aux américains et aux britanniques), la fiction risque de dépasser la réalité des besoins du téléspectateur.

L’engendrement de navets pour conquérir un marché en pleine expansion pourrait menacer d’envahir nos écrans. Mieux vaut se concentrer à développer le meilleur de la production comme Fais pas ci, fais pas ça, miser sur de jeunes auteurs prometteurs en les ouvrant à de nouveaux formats (Kyan Khojandi de Bref ) ou ouvrir la fiction télévisée à de grandes plumes.
François Simoneschi
Mise en ligne : vendredi 10 janvier 2014 / Révision : vendredi 10 janvier 2014
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Comment regarder Chérif ?
En commençant par le premier épisode, qui pose la situation entre les personnages. Puis sans ordre précis, puisque les épisodes sont indépendants les uns des autres.
Y a-t-il une fin ?
Pour l’instant, non.
À quel public s’adresse-t-elle ?
A un public familial peu exigeant.
Si vous avez aimé, vous pouvez regarder dans le même genre : Columbo. Il faut toujours préférer l’original à la copie, même partielle.
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Fiche technique de Chérif (suite)
Produit par Stéphane Drouet
Producteur exécutif : Bertrand Soupey
Production : MakingProd

Distribution
Abdelhafid Metalsi : Kader Cherif
Carole Bianic : Adeline Briard
Mélèze Bouzid : Sarah Cherif
Élodie Hesme : Deborah Atlan
François Bureloup : Joël Baudemont
Clémence Thioly : Stéphanie Giraud
Vincent Primault : Philippe Dejax
Greg Germain : Jean-Paul Doucet
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Épisodes de Chérif
Première saison (2013)
1 1.01 Les liens du sang
2 1.02 Faux-semblants
3 1.03 Le dernier mot
4 1.04 Injustice
5 1.05 Crime à la carte
6 1.06 Diagnostic : meurtre
7 1.07 Reine d’un jour
8 1.08 Black Jack